Délais de paiement : quelles évolutions ?

Mis à jour: 5 mars 2024
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Le respect des délais de paiement est essentiel à la bonne tenue des comptes de l’entreprise. En France, ils sont strictement encadrés par la loi.

Toutefois, certaines entreprises n’hésitent pas à les outrepasser pour préserver leur propre trésorerie, au risque de mettre à mal celle de leurs créanciers. Les petites entreprises, souvent les premières victimes de ces pratiques, ont tout intérêt à veiller de près au respect de ces délais.

Délai de paiement : que prévoit la loi ?

Hormis les cas de paiement au comptant, le délai de paiement – c’est-à-dire la période pendant laquelle il est possible de régler l’achat de biens ou services – est par défaut de 30 jours après la réception. Le délai doit figurer sur chaque facture et dans les conditions générales de vente (CGV). Si ce délai est négocié entre le fournisseur et l’acquéreur, il peut

  • être inférieur à 30 jours
  • aller jusqu’à 45 après la date d’émission de la facture ou 45 jours fin de mois
  • aller jusqu’à 60 jours à compter de la date d’émission de la facture
  • 90 jours à compter de la date à laquelle est émise la facture en cas de ventes livrées hors de l’Union européenne, réalisées par un professionnel en franchise de TVA.

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Pénalités de retard

En cas de retard de paiement, l’acheteur doit verser une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement à son fournisseur, conformément à ce qui est indiqué dans les CGV. Le taux des pénalités varie tous les semestres, et est fonction du taux directeur de la Banque centrale européenne (BCE). Au premier semestre, il est égal au taux directeur en vigueur au 1er janvier, auquel sont ajoutés 10 %. Ainsi, pour le 1er semestre 2024, le taux des pénalités est de 4,5 % plus 10 %, soit 14,5 %. Le taux des pénalités ne peut pas être inférieur à 3 fois le taux de l’intérêt légal au 1er trimestre 2024, c’est-à-dire à 15,21 %.

De plus, une indemnité forfaitaire de 40 € est appliquée pour frais de recouvrement pour chaque facture non payée dans les délais.

Enfin, en cas de non-respect de la réglementation, l’entreprise encourt des sanctions. Le montant est de 75 000 € pour une entreprise individuelle et de 2 millions € pour une société. Ces montants sont doublés en cas de récidive sous 2 ans après une première sanction. Ils s’élèvent donc respectivement à 150 000 € et 4 millions €.

Projet de règlement européen : des délais de paiement à 30 jours

Un nouveau règlement de la Commission européenne, en projet depuis septembre 2023, vise à harmoniser les pratiques en matière de délais de paiement pour protéger les PME.Il prévoit des mesures telles que le paiement automatique des intérêts et des compensations forfaitaires et de plafonner le délai de paiement maximal à 30 jours, sans possibilité de dérogation. Ce dernier point suscite de vives inquiétudes. Il est ainsi qualifié d’« arme de destruction massive pour le commerce français » par la Fédération du commerce et de la distribution (FCD). Dans un communiqué commun, CPME, Medef et France Industrie déclarent : « Le passage du délai de paiement à 30 jours pour toutes les entreprises, tous les secteurs et dans toutes les situations, sans pouvoir jamais y déroger, ignore la réalité des entreprises et contrevient au principe de liberté contractuelle. Ce sont nos PME qui seraient sans doute les plus pénalisées car dans l’impossibilité de s’adapter. Dans un contexte de taux d’intérêts élevés, cela pèserait fortement sur leur trésorerie. »

Quid des retards de paiement en 2023 ?

Selon le cabinet Altarès, expert de la data d’entreprise, le retard de paiement au 2e trimestre 2023 atteint 12 jours en France. « En moyenne, en France comme en Europe, 1 entreprise sur 2 règle ses factures à l’heure. Ce chiffre ne doit pas masquer cependant la recrudescence des gros retardataires (plus de 30 jours). Une situation particulièrement préoccupante chez les plus petites structures. » La Coface, spécialiste de l’assurance-crédit pour le commerce extérieur, estime dans une étude 2023 sur le comportement des paiements des entreprises en France que « en 2023, 97 % des entreprises françaises ont accordé des délais de paiement à leurs clients, avec un délai moyen de 48 jours. Malgré cela, 82 % des entreprises ont subi des retards de paiement au cours des 12 derniers mois. La majorité d’entre elles déclare qu’ils ont même été plus longs et plus fréquents. » Les TPE, réputées prudentes dans l’accord de délais de paiement, sont pourtant 95 % à le pratiquer, pour des délais plus courts que les grandes entreprises (inférieurs à un mois pour 35 % d’entre elles).

Autre donnée communiquée par Ellisphere, société leader dans l'information sur les entreprises, le retard de paiement moyen a reculé de 3 % en 2023, pour atteindre 17,7 jours, tous secteurs confondus, en France métropolitaine. Toutefois, des variations ont été observées sur l’année : au 4e trimestre, le retard de paiement a légèrement augmenté, à 17,9 jours. Le secteur de la construction est le plus impacté, avec un retard de paiement moyen de -5 %, soit 22,4 jours. C’est deux fois plus que le secteur du commerce qui atteint 11,2 jours. En revanche, des secteurs comme l’électricité et l’immobilier enregistrent les plus fortes améliorations des délais de paiement. Les très petites entreprises (TPE) sont qualifiées de « bons élèves » car elles règlent leurs factures le plus souvent à échéance ou même avant le terme. « Ces dernières ne représentent plus que 62 % du total des factures traitées par les TPE fin 2023, contre encore 67 % en début d’année. Effet mécanique, la part des retards légers (1 à 30 jours) passe de 26 % à 28 % du total des factures traitées par les TPE », précise Ellisphere. En revanche, seules 22 à 27 % des factures sont payées à échéance par les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises.

Facture électronique : futur remède aux retards de paiement ?

En France, l’obligation de facturation électronique pour les entreprises privées a été introduite par la loi de Finances rectificative pour 2022. Elle intervient dans la continuité de l’obligation d’adresser les factures au secteur public par voie électronique, en vigueur depuis le 1er janvier 2020. L’un des objectifs de la facturation électronique est d’améliorer la compétitivité des entreprises, la  dématérialisation étant censée permettre une diminution des délais de paiement et de la charge administrative.

Toutefois, la loi de Finances pour 2024 a fixé un nouveau calendrier du passage à la facturation électronique des entreprises, qui repousse les échéances de sa mise en œuvre. L’obligation d’émission des factures électroniques est désormais fixé au :

  • 1er septembre 2026 pour les grandes entreprises et les ETI;
  • 1er septembre 2027 pour les petites et moyennes entreprises (PME) et les micro-entreprises.

La facturation électronique est considérée comme un levier d’amélioration des retards de paiement. Mais elle ne donnera pas de résultat tangible tant que les entreprises n’y auront pas recours en nombre.

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Délais de paiement, une variable d’ajustement pour les entreprises ?

Selon le Baromètre 2023 réalisé par le cabinet ARC avec l’IFOP, 83 % des entreprises interrogées (+3 points par rapport à septembre 2022) pensent que les délais de paiement risquent de devenir une variable d'ajustement, et donc d'augmenter. 50 % d’entre elles disent avoir recours à un allongement du délai de paiement avec leurs fournisseurs. Les délais de paiement sont donc utilisés comme un moyen de financement. Pourtant, 93 % des entreprises sondées ont conscience que le non-respect des délais de paiement met en danger la santé des entreprises au point de pouvoir aboutir à un dépôt de bilan.

La Coface avance pour sa part que « 27 % des entreprises attribuent les retards de paiement aux difficultés financières de leurs clients, et 41 % estiment que ces retards sont délibérés dans un objectif de gestion des flux de trésorerie ».

L’affacturage, un moyen de sécuriser les paiements

Quelle que soit la raison qui pousse les entreprises à régler leurs factures avec retard, cela impacte l’état de la trésorerie de leurs créanciers. Pour maintenir sa trésorerie, il est donc essentiel de réduire tant que possible les délais de règlement de ses propres clients et d’éviter les dépassements d’échéance.

L’ affacturage est un moyen simple de financer son poste client. Cette technique, adaptée à toute taille d’entreprise, permet de bénéficier rapidement, dès l’émission d’une facture, d’une avance de trésorerie de la part de l’affactureur. Ce « factor » se charge, moyennant le versement d’une commission, de gérer les relances et les encaissements. L’affacturage offre ainsi l’assurance de ménager sa trésorerie tout en se protégeant des impayés.